Wislawa Szymborska

(Prowent 1923 – Cracovie 2012), prix Nobel de littérature en 1996

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A mon cœur, un dimanche (extrait)

Soixante-dix mérites à la seconde.
Chacune de tes contractions
est comme la mise à l’eau
d’un bateau qui prend la mer,
et part pour un tour du monde.

Sois remercié, mon cœur
qui sans cesse,
m’extrais de ce grand tout,
distincte, même endormie.

Je ne sais quelles gens, traduit du polonais par Piotr Kaminski, Fayard, 1997
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Vue avec grain de sable (extrait)

Nous l’appelons grain de sable.
Mais lui-même ne s’appelle ni grain ni de sable.
Il se passe de toute appellation
générale ou particulière,
éphémère ou définitive,
appropriée ou inexacte.

Indifférent à notre regard, à notre toucher,
puisqu’il ne se sent ni regardé ni touché.
Et le fait de tomber sur le rebord de la fenêtre,
c’est notre aventure, pas la sienne.
Pour lui c’est comme tomber sur n’importe quoi,
sans aucune certitude, d’ailleurs, s’il tombe encore,
ou s’il est déjà tombé.

De la mort sans exagérer, traduit du polonais par Piotr Kaminski, Fayard, 1997
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